Johannisme et tradition d'Ephèse


J'ai promis à Alfonso que Richard ferait un court exposé sur la tradition d'Ephèse et le johannisme. J'ai remarqué bien souvent que, dans l'esprit de certaines personnes, il y a confusion sur ce sujet. Nos jeunes disciples ne seront pas fâchés qu'on leur en parle à nouveau.
Richard, je vous donne la parole.

‑ Pour bien comprendre ce qu'est le johannisme ‑ qui découle de la tradition d'Ephèse ‑ il faut l'étudier à travers l’œuvre de saint Jean l'apôtre : Jean, le fils de Zébédée et de Salomé, le frère de Jacques le Majeur, le disciple que Jésus aimait, celui qui a reposé sa tête sur la poitrine de Jésus pendant la dernière Cène, qui fut au pied de la croix lors de la Crucifixion et qui a vu la Résurrection, celui qui fut l'un des deux disciples de Jean-Baptiste à se mettre dans la suite de Jésus.

Jean était très imprégné de judaïsme et avait l'habitude de s'exprimer parmi les juifs. Son œuvre s'en ressent et a une coloration nettement araméenne. Il a voué une grande vénération à Jean-Baptiste ; il a été son disciple, a suivi et aimé ses prédications. Le Baptiste a été le Précurseur, celui qui a annoncé la venue de Jésus, le Messie.

Il ne voulait pas être pris par la foule comme un prophète, mais seulement comme celui qui reconnaîtrait l' « Agneau de Dieu » et l'attendait.

Jean-Baptiste pratiquait une très vieille tradition essénienne de dualité, ou plutôt de dualisme monothéiste. C'est-à-dire que, dans chaque manifestation, il voyait l'opposition : la lumière et les ténèbres, la vie et la mort, etc. C'est une forme de pensée dont Jean l'apôtre restera imprégné toute sa vie et que l'on retrouvera dans son Evangile.

Jean a fait des séjours à Antioche, à Patmos, île de la mer Egée, et surtout à Ephèse. L'école d'Ephèse pratiquait cette même forme de pensée dont la tradition [polaire ?] se perd dans la nuit des temps.

C'est à Ephèse que Jean a écrit, dans les dernières années de sa vie, le IVème Evangile.

Certains ont mis en doute que Jean fut l'auteur de cet Evangile, et, à cause de cela, il a été très controversé. Pourtant, Jean n'a jamais trahi le véritable sens du message du Christ. Sa foi en Jésus était profonde. Pour lui, le Christ était réellement le Verbe qui s'est fait chair, le fils de Dieu.

Dans son Evangile, il relatera, comme dans les synoptiques, la vie, la passion et la résurrection de Jésus. Mais il verra tout cela en théologien. Il s'était imprégné des idées de Jean-Baptiste, et sa propre pensée était mi-juive, mi-chrétienne. Il s'est attaché plus au symbolisme qu'à l'aspect matériel des faits, et c'est ce qu'on lui reprochera.

Il se sert parfois du mot Logos, employé dans la philosophie grecque.

Pour les juifs, le Logos est un intermédiaire entre Dieu et le monde. C'est la « Loi » qui a été donnée aux hommes par Moïse. C'est une faculté de pensée, c'est la raison profonde d'une chose.

Pour Jean, le Logos est la révélation de Dieu faite pour les Hommes à travers Jésus, le Verbe, le Messager de Dieu, le Salut, la Parole. C'est lui qui apporte au monde la Grâce, la Vérité.

Malgré cela, l'Evangile de Jean n'est pas toujours admis comme les trois synoptiques. Pourtant, si on l'étudie profondément, on verra qu'il est écrit dans le même sens qu'eux et les complète.

Je crois que ce qui a motivé critiques et controverses, c'est que Jean voit dans le miracle le symbole plutôt que le fait. Il ne conteste pas le miracle mais en fait ressortir toute la valeur symbolique qui s'en dégage. Par exemple, Lazare a été ressuscité pour que Jésus démontre qu'il est la Vie et la Résurrection. De même pour l'aveugle, puisque Jésus est la Lumière, il peut redonner la lumière aux âmes endormies. A tout miracle il donne un sens physique et un sens spirituel. Il veut « signifier » le don de Dieu par le Saint-Esprit. Il en est de même pour les Paraboles.

Pour lui, le Verbe existe de toute éternité. Il a toujours été avec Dieu, est lui-même Dieu et créateur de toutes choses. Ce qui rejoint l'idée juive, car il est écrit dans l'Ain-Soph :

« La sagesse divine, reflet de la lumière éternelle, était auprès de Dieu avant ses œuvres les plus anciennes, dès le commencement. Il est le Principe Universel et Divin, la racine de tout, il est illimité, sans fin. Il est l'existence absolue, la pensée absolue. »

C'est dans cet esprit que les maîtres d'Ephèse préparaient les adeptes avant de leur conférer l'initiation. Une divergence est ainsi apparue avec le dogme strict de l'Eglise, car celle-ci n'admettait pas cette façon d'interpréter l'Evangile de Jean.

Comme autre divergence, on peut noter que chez les johannites la confession n'est pas jugée nécessaire si le repentir est profond.

On peut s'étonner que les Templiers ‑ qui se déclarent fidèles à la tradition johannique ‑ aient choisi comme fête le 24 juin qui est celle de saint Jean-Baptiste ; mais il ne faut pas oublier que l'apôtre Jean considérait Jean-Baptiste comme son maître. C'est aussi parce que Jean-Baptiste a baptisé Jésus que les Templiers l'honorent. Il n'y a donc pas de contradiction à cela.

Extrait du livre de Gabrielle : des Templiers aux Massenies du St Graal

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