" Graal " : tao de l'Occident, néant empli de son propre mystère, représentation née de l'absence et versée dans le vide. Le nom du Graal était légion. Mais à l'inverse de la légion satanique, cette légion-là scintillait de significations associées aux plus nobles vertus. Par les interprétations du Graal se rassemblaient les motifs de l'âme occidentale. C'était le vitrail de la grandeur d'être. Pureté, prouesse, valeur, aventure, amour ou foi, tout faisait sens, tout était Graal. Ô siècle béni (le douzième) où la chevalerie arrima une société à ces vertus de force et de beauté. Alors, le haut et le bas, le propre et le malpropre, la clarté et l'obscurité, le bien et le mal, le blanc et le noir ne se valaient pas.
Le chevalier sur le chemin cherchait la signification de son existence et le moyen de la hisser à sa plus haute définition. En aucun cas on n'eût réduit le Graal à un objet, fût-il une coupe christique. C'était autre chose. Cela pouvait signifier le rassemblement des plus hautes ambitions.
Une autre piste : le Graal correspondait à la recherche elle-même. Seul importerait alors le mouvement menant de l'obscurité à la lumière, c'est à dire de la question à la réponse. La quête du Graal se serait ainsi définie par son propre élan. Naissant de son désir, vivant de sa mécanique, s'alimentant de sa propre existence, le Graal était la quête. " Ipséité " du Graal diraient les cuistres.
On imaginait un lai.
- Que cherches-tu chevalier ?
- Je cherche à chercher.
- Trouveras- tu ?
- Je ne veux pas trouver.
- Où vas-tu ?
- On continue la quête.
- S'achèvera-t-elle ,
- Sa fin est de ne pas en avoir ".
Avec les fées - Sylvain Tesson
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