Esotérisme templier & Massenies

Extrait du livre de Gabrielle : des Templiers aux Massenies du St Graal

‑ Vous avez exprimé, mon cher Alfonso, le désir d'être instruit en Massenie. J'en suis touché et très heureux. Mais, pour que vous compreniez ce qu'est une Massenie ‑ et la nécessité qu'il y a de la créer ‑ il faut d'abord que je vous parle des Templiers.

Nous n'évoquerons pas la naissance de l'Ordre, ni sa vie officielle. Etant Portugais, vous devez connaître tout cela. Mais ce que vous ne savez peut-être pas, c'est tout ce qui a trait à l'activité ésotérique des Templiers.

Les Templiers se disaient les descendants des Jomsvi­kings, association de l'Occident, importée de Scandinavie, où elle a pris naissance. Ces Jomsvikings croyaient au troisième œil des occultistes, l’œil frontal de la connaissance. Pour matérialiser leur croyance, ils possédaient une statue à trois faces appelée « mimère ». Chaque face était munie d'une pierre entre les deux yeux représentant le troisième œil. En mythologie, le mimère scandinave était le gardien de la fontaine cachée, source de l'esprit et de la sagesse. Ils avaient un sceau représentant deux lances croisées. Leur manteau était blanc, leur croix, aux branches égales, rouge, et leur cheval noir.

Ils étaient Celtes et se disaient dépositaires de la Tradition Primordiale. On retrouve leur trace en Chaldée où ils auraient fréquenté des centres initiatiques, en Irlande et en Ecosse.

Au IXème siècle, l'Eglise de Rome a condamné l'Eglise celte. Les constructeurs d'Ecosse et d'Irlande, qui repré­sentaient la majorité des Jomsvikings, ont dû émigrer sur le continent. Ils se sont regroupés en sociétés secrètes. En construi­sant des églises, ils ont mélangé leurs symboles celtes aux symboles chrétiens pour que leur tradition ne se perde pas.

Si vous allez dans le duché de Bretagne, vous verrez ces symboles dans certaines églises. Vous verrez aussi, sur les piliers, la feuille de saule qui, pour eux, représentait le rameau d'or, et signifiait innocence et pureté. Dans les lieux où les descendants des Jomvikings ont travaillé avec des bâtisseurs chrétiens, ils ont dressé de grandes croix celtiques en pierre, souvent en granit, au centre desquelles il y a la croix chrétienne.


 Au moment où fut créé l'Ordre du Temple, de nombreux constructeurs celtes y sont entrés, parmi lesquels se trou­vaient les initiés. Les Templiers, déjà dépositaires du mystère du Graal qui leur était propre, le sont donc aussi devenus de la Tradition Primordiale.

De plus, à l'occasion des Croisades, certains Templiers ont eu des échanges spirituels avec des Arabes, des juifs et les ismaéliens qui fréquentaient la « Maison des Scien­ces » fondée par ces derniers, ainsi qu'avec des chrétiens johannistes. D'après une certaine tradition, le patriarche Théoclès de Jérusalem, chef de l'Eglise johanniste primitive, aurait transmis ses pouvoirs en 1118 au fondateur de l'Ordre du Temple, Hugues de Payns ; et un de ses compagnons, Geoffroy de Saint-Omer, aurait reçu une initiation musul­mane dans la secte ismaélienne des Assassins.

L'ismaélisme secret était une communauté gnostique détenant la connaissance occulte des lois cachées de l'Uni­vers. C'était la plus haute forme de savoir qui ne pouvait être révélée qu'à de rares initiés. Dans la bibliothèque de la Maison des Sciences, on pouvait lire les enseigne­ments de Simon le Magicien, philosophe juif, de Basilide d'Egypte, philosophe de l'école alexandrine, qui vivait deux siècles avant Jésus-Christ, de Valentin d'Alexandrie, qui vivait au deuxième siècle de notre ère, et de bien d'autres encore. On apprenait les sept degrés initiatiques de l'Islam, et il est intéressant de savoir que les Templiers avaient aussi sept degrés d'initiation qu'ils ont réunis en trois grades.

Les chevaliers croisés se rendirent plusieurs fois dans la forteresse isolée d'Alamout, véritable nid d'aigle, où ils furent reçus par le Seigneur de la Montagne, successeur du « Vieux de la Montagne », fondateur de la secte cachée des ismaéliens à la fin du XIème siècle. Ce dernier était iranien et avait fait des études très poussées à la célèbre université de Nichapour, dans le Khorassan. C'était un visionnaire qui avait eu dès son adolescence accès à la science occulte iranienne, elle-même imbue du message de Zoroastre et enrichi par des apports des anciennes civilisations de l'Asie centrale et orientale, grecques, arabes et égyptiennes.

Dans la Maison des Sciences, les Templiers ont connu des « Harodim », qui étaient des Hébreux consacrant leur vie à l'étude de la Kabbale.

La Kabbale doit être considérée comme une voie qui mène à la sagesse, à la connaissance. A travers elle, les Harodim recherchaient les enseignements se rapportant aux lois des sciences hermétiques : astrologie, astrosophie, médecine, connaissance des courants telluriques permet­tant de trouver les meilleurs emplacements pour les cons­tructions sacrées. Comme les alchimistes, ils étudiaient les processus d'évolution de la nature et des transmuta­tions autant chez l'homme que dans la matière. Ils recher­chaient la substance qui recèle le secret divin de la nature et de l'homme, image de celle-ci.

Ils s'efforçaient aussi de retrouver le sens primitif, caché et cependant réel, de la Genèse de Moïse. Ils recher­chaient Dieu dans la matière. A travers l'arithmétique, et par la correspondance des valeurs des chiffres et des lettres, ils arrivaient à trouver et à traduire le sens caché des lois universelles. La traduction des symboles et de leurs correspondances forme un langage invisible, mais l'aspect du visible est le reflet de l'invisible.

Les Harodim pensaient que le propre de l'homme ‑ à l'image de la nature ‑ est de se renouveler lui-même en s'améliorant sur tous les plans. Certains croisés ‑ mais surtout les Templiers ‑ ont étudié avec eux la Kabbale, et, avec les ismaéliens, leurs doctrines. Tous ceux-ci avaient une foi différente, mais ils étaient unis dans le même idéal spirituel. Cela vous explique pourquoi, à la suite de ces contacts, les Templiers ont voulu réunir les trois religions monothéistes. Certains Templiers ont reçu, en Orient, l'initiation de maîtres instruits dans la tradition d’Éphèse.

‑ Je vous remercie infiniment de m'avoir appris tout cela, dit Alfonso. Je voudrais savoir ce qu'est la tradition d’Éphèse. J'ai entendu dire que les Templiers s'y réfé­raient et évoquaient une école de pensée johannique. Mais, chez nous, au Portugal, il ne peut en être parlé, car l'Eglise condamne les johannistes.

- Dans une de nos réunions, vous rencontrerez notre frère Richard. C'est un homme qui consacre tout son temps libre à la théologie. Il vous répondra mieux que moi-même.
*****
Je vais vous dire maintenant comment s'est fondée la première Massenie. Un ancien croisé de grande noblesse, habitant à la limite de la Brie champenoise, en a été le fondateur. Il s'appelait Jean de Rampillon. C'est en Terre Sainte que, grâce à un ami Templier, il a été introduit dans le milieu occulte dont je vous ai déjà parlé. Il en a été très impressionné. Ces êtres étaient si différents de ceux qu'il avait connus jusque-là. Il a parti­cipé à leur vie spirituelle. Il a compris que des hommes non-chrétiens peuvent avoir en commun la noblesse du cœur et un idéal élevé. Certains étaient de véritables ini­tiés.

Jean de Rampillon les admirait et les aimait. Il s'est acheminé vers la connaissance et, avant qu'il ne quitte l'Orient, son maître lui a conféré l'initiation. Cette voie nouvelle l'a transformé. Quand il est revenu dans sa Brie natale et qu'il y a retrouvé ses anciens compagnons, il leur a raconté avec enthousiasme ce qu'il avait vécu. Il s'était pris d'affection pour un jeune Templier rencontré en Terre Sainte et qui se trouvait maintenant en Provence...

Et puis, ce fut l'arrestation brutale des Templiers...

Le jeune Templier provençal est venu se réfugier chez Jean de Rampillon qui le considérait comme son fils spi­rituel. Ils étaient tous deux bouleversés par les dures épreuves que subissaient les Templiers, et ont assisté, impuissants, aux procès et à la suppression de l'Ordre.

Au même moment, les compagnons constructeurs « ma­çons francs », ont eu aussi à subir bien des déboires. Le roi leur a retiré peu à peu leurs franchises. Il y a eu des arrestations arbitraires. On tuait des compagnons sur dénonciations calomnieuses. Rappelez-vous que notre ancêtre commun s'est, à cause de cela, exilé, d'abord en Espagne, ensuite au Portugal. Jean de Rampillon a voulu venir en aide à ces pourchas­sés. Il a voulu aussi que l'esprit et la tradition du Temple ne se perdent pas. Aidé de son fils spirituel, il a décidé de créer un Ordre dans lequel il réunirait des personnes qui se considéreraient comme frères, sans distinction de confession ou de race, sans titres de noblesse obligatoires, ayant le même idéal et le même but.

En accord avec les enseignements reçus en Orient, il a décidé que l'Ordre aurait parmi ses membres des kab­balistes et des alchimistes. Il choisit vingt-quatre personnes sûres ayant reçu une initiation du second degré qui s'engageaient à le seconder dans sa tâche. Ils aideraient ceux qui sont désemparés à ne pas s'abandonner et à rechercher la voie de la con­naissance. Ce serait pour chacun une « queste », et c'est dans cet esprit qu'il a appelé la Massenie « Massenie du Saint-Graal ».

Une Massenie est, en effet, un groupe, une loge, ou en­core une « kahaba », terme hébreu signifiant un lieu non consacré dans lequel le culte pouvait être pratiqué. Le Saint-Graal est tellement merveilleux et important que je préfère vous en parler longuement une autre fois.

A l'origine, ils étaient vingt-six membres : vingt-quatre frères, le fondateur et son fils spirituel. Ce n'est pas par hasard que Jean de Rampillon avait choisi le nombre vingt-six. C'est le résultat d'un calcul kabbalistique que je vous expliquerai plus tard. Ils étaient dix « sédentaires » vivant dans des lieux non éloignés de la Massenie ; dix autres établis plus loin, voire même à l'étranger ; les six derniers étaient des occultistes et des alchimistes.

La Massenie était habitée en permanence par un homme sage dont le genre de vie ne devait pas attirer l'attention. L'Ordre de la Massenie était, en effet, un Ordre secret. C'était une nécessité, car l'idéal de la Massenie était sur bien des points en désaccord avec ceux de l'Eglise catho­lique romaine ou de la classe dirigeante.

Aux réunions de la Massenie, les frères venant de l'exté­rieur apportaient des nouvelles d'anciens Templiers, et relataient les événements importants survenus dans le monde.

Je vais vous exposer les buts et la règle de la Massenie. La Massenie s'était fixée comme buts d’œuvrer sur les trois plans : humain, matériel et spirituel. Les frères de la Massenie devaient :

1° Sauvegarder l'esprit du Temple, la Tradition.
2° Etre tolérant avant toute chose ; admettre que si certains êtres sont « différents » de vous, ils n'en sont pas moins vos frères en humanité.
3° De ce fait, développer l'amour du prochain et avoir l'esprit de service.
4° Apprendre à se dominer et à se perfectionner.
5° Estimer un être pour sa valeur profonde, sans considération de contingences matérielles.
6° Faire naître en chacun la prise de conscience.
7° Ouvrir le chemin de la connaissance à ceux qui le désirent, et les amener à l'initiation.

Il y avait trois grades et, pour les atteindre, il y avait trois degrés d'instruction.

Le premier degré consistait à instruire l' «apprenti» dans son métier manuel ou intellectuel, et à lui apprendre les lois occultes mineures, lois qui intéressent les «petits mystères» de la nature.

Au bout d'une année, si l'élève avait le désir de poursuivre ses études occultes, et si le magister de la Massenie pensait qu'il le pouvait, il avait la possibilité de continuer afin d'arriver au second degré. Mais l'élève était prévenu du danger que son esprit pouvait encourir. On lui demandait de s'engager au secret. Une indiscrétion de sa part provoquerait son exclusion de l'Ordre. Cette fois-ci, le temps d'études était très variable. Cela dépendait de l'éveil du candidat.

Le troisième grade n'était pas accessible à tous. Il fallait que l'adepte se soit affranchi de la faiblesse ; qu'il ait appris a maîtriser la douleur et le chagrin ; qu'il ait dépassé la limitation de son mental toujours trop nerveux ; qu'il ait réalisé que les idées et les actions sont creuses si elles ne sont pas remplies du souffle de Dieu. Il fallait qu'il ait transformé son « moi » intérieur, qu'il ait retrouvé son harmonie, qu'il soit devenu apte à recevoir occulte­ment pour transmettre.

‑ Mais, comment y arriver, demande Alfonso très inquiet du chemin à parcourir, et comment savoir que l'on y est arrivé ?

‑ Rassurez-vous, mon fils, c'est en vous que vous le réaliserez, et, lorsque vous serez prêt, il suffira d'un mot, d'un regard, ou d'une petite chose qui se passera en vous, pour que vous ayez l'illumination intérieure, la petite étincelle qui jaillira, et ce sera comme un bandeau qui tombe.

Dans la Massenie, il y a une chose très importante, c'est la méditation. Elle est un lien de correspondance entre le monde inférieur sensible et le monde supérieur de l'intel­ligence. Elle nous fait comprendre l'âme du monde, et par ce fait, la foi dans la vie. Par la méditation, l'éveil du soi intérieur amène au secret de l'existence universelle, aux sources de la vie. Elle dégage une force cosmique, particulièrement quand elle est pratiquée en groupe. On doit arriver au « moi » cosmique qui est la conscience unifiée.

L'ordre visible de l'Univers n'est que la répercussion de l'ordre invisible des formes cosmogoniques, des monades spirituelles, genre, espèce. Par leur perpétuelle involution dans la nature, elles produisent l'évolution de la vie. La vie n'est pas au-dehors, mais au-dedans de nous.

Tout est lutte, et rien n'est acquis sur le chemin initia­tique ; chacun doit arriver au but par lui-même.

La méditation développe notre intuition, elle est le con­tact entre l'homme et le divin. Elle nous permet de nous «réaliser», et ainsi apparaîtra notre rayonnement réel. Elle nous apprend à concentrer notre pensée et, par cela, à agir sur notre volonté. L'art aide à la méditation. Suivant votre tempérament, vous pouvez méditer en partant d'un son, d'une phrase musicale, d'une couleur ou d'une phrase.

‑ Mais comment médite-t-on ? demande Alfonso.

‑ C'est très simple. Il faut être assis de façon que votre colonne vertébrale soit droite et non appuyée. Ne croisez ni jambes ni bras. Détendez-vous entièrement. On ne doit pas être gêné par son corps. Quand la détente est obtenue, pensez au son, à l'objet, à la phrase, etc. N'essayez pas de diriger votre méditation ou de faire un effort ; laissez-vous aller. Le cheminement de la pensée se fera seul, et vous arriverez à la quintessence de ce que vous avez choisi. Vous n'y arriverez pas du premier coup, mais ne vous découragez pas et recommencez. Un jour, le processus méditatif se déclenchera, et vous serez un méditant. Cela est très enrichissant, croyez-moi, et cela ramène un équilibre intérieur extraordinaire. C'est très important. D'autres personnes arrivent à faire en elles le vide absolu et attendent que jaillissent une idée. C'est une pratique très difficile et utilisée surtout par les Hindous.

Le jour où vous serez très entraîné à la méditation, la position de votre corps n'aura plus la même importance. Mais vous devrez garder toujours la colonne vertébrale bien droite. Vous pourrez, à l'exemple du Bouddha, croiser les jambes et les avant-bras ou joindre les mains pour concentrer en vous une force magnétique et la répandre ensuite. C'est un circuit fermé. Vous apprendrez au fur et à mesure les différentes méthodes.

Voilà pour vous, mon cher Alfonso, un grand sujet de réflexion. Dans peu de temps, nous avons une réunion à la Massenie, et il était bon que vous sachiez cela avant.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire